État de l’industrie des éleveurs et transformateurs d’insectes comestibles au Québec

Picture of Louise Hénault-Ethier

Louise Hénault-Ethier

Louise est co-fondatrice et directrice recherche, développement et innovation chez TriCycle.

Autres auteurs:

Alexis Fortin, Étienne Normandin, Guillaume d. Renaud et Noémie Hotte

Pour plus d’informations, écrivez à louise@tricycle.eco

Citation suggérée:

Hénaut-Ethier, L., Fortin, A., Normandin, É., D. Renaud, G., Hotte, N. (2022). État de l’industrie des éleveurs et transformateurs d’insectes comestibles au Québec – regard sur les répercussions de la pandémie de COVID-19.TriCycle Inc. 16 p.

La filière de l’élevage et de la transformation des insectes comestibles au Québec est relativement jeune. La popularité de l’entomophagie a, quant à elle, cru au Québec suite à la publication du rapport de la FAO intitulé Insectes comestibles – Perspective pour la sécurité alimentaire et l’alimentation animale en 2014. 

Cette popularité croissante s’est suivie d’une constante évolution dans le nombre de publications sur le sujet de l’entomophagie dans les médias populaires (Figure 1). Sans constituer une preuve robuste, la hausse observée des mentions dans les médias populaires suggère un engouement croissant pour le sujet. Cette hausse observée récemment et localement dans les médias semble d’ailleurs cohérente avec la hausse du nombre de publications scientifiques et de brevets recensés à l’international. [1] 

Figure 1: Croissance du nombre de mentions des insectes comestibles dans les médias au Québec entre 2013 et 2018. Basé sur une recherche Google de mots clés en français (‘’insectes comestibles’’ AND Québec) et en anglais (‘’edible insects’’ AND Quebec) effectuée le 5 avril 2020.

Figure 1: Croissance du nombre de publications scientifiques et de brevets à l’échelle internationale à propos des insectes comestibles (‘’edible insects’’). (Figure d’après les données de Dunket et Payne, 2016)

Selon une première étude sur le déploiement de l’industrie des insectes destinés à la consommation humaine au Québec, la toute première entreprise québécoise de transformation de produits d’insectes serait née en 2014 (uKa Protéine). En 2016, on assistait au lancement de trois élevages destinés à l’alimentation humaine (La Ferme d’Insectes, Virebibittes et Krikk), tandis qu’un élevage destiné à l’alimentation animale était en cours de planification (Larvatria). [2] 

Mais cette jeune industrie est florissante. Toujours selon la première étude de l’industrie québécoise datant de 2017 [3] , plusieurs facteurs sont favorables à l’essor de cette filière dans la province, des facteurs tant environnementaux que sociaux mais aussi relatifs aux bénéfices nutritionnels de l’entomophagie. D’un autre côté, les enjeux économiques et techniques représentent probablement la plus grande barrière à l’essor du secteur. Une revue internationale des enjeux politiques, légaux et réglementaires place le Canada, et plus particulièrement le Québec, dans un contexte favorable à l’essor de cette filière [4] . Selon l’Association des éleveurs et transformateurs d’insectes du Québec (AÉTIQ), il y avait en 2019 environ une quarantaine d’éleveurs d’insectes comestibles au Québec [5] , mais ces chiffres restent à valider notamment à cause de l’évolution rapide du secteur, marquée par un grand nombre d’entreprises en démarrage, souvent à petite échelle, suivi par la cessation des activités de plusieurs autres quelques années après le début de leurs activités. Ces éleveurs sont des éleveurs de ténébrions meuniers, mais aussi de grillons et de mouches soldat noires. Le secteur de la transformation pour l’alimentation humaine et animale est aussi florissant, avec plus d’une dizaine d’entreprises établies.

Le 30 mars 2020, une rencontre visant à rassembler les principaux acteurs de l’industrie des insectes comestibles a été organisée dans le cadre des activités de la Vitrine Entotechnologique. Cet atelier s’adressait à des participants issus des secteurs de la production, de la transformation et de la mise en marché des insectes et de produits qui en contiennent, ainsi qu’à différents acteurs de soutien de l’industrie, tant au niveau de la recherche qu’au niveau des institutions gouvernementales. L’objectif était de regrouper ces acteurs dans le but de dresser un état des lieux et d’initier un dialogue dans les efforts de consolidation de la filière au Québec. Tandis que le monde entier faisait face à une crise sanitaire importante, il était essentiel de fédérer les acteurs de la filière entomophagique et entotechnologique afin de solidairement confronter cette crise et de partager ensemble les savoirs et les expertises qui consolideront l’émergence de ce secteur agroalimentaire stratégique au Québec.

 

OBJECTIFS

  1. Énumération des enjeux économiques, technologiques, politiques et de gouvernance du secteur de l’entomophagie et des entotechnologies visant:
    1. la consolidation des rôles de divers acteurs de la filière afin de solidariser les producteurs et les transformateurs;
    2. la mise en commun des savoirs et des ressources pour améliorer la gestion des opérations en temps de crise sanitaire mondiale;
    3. la priorisation d’axes de recherches conjoints;
    4. l’élaboration de priorités en ce qui a trait au transfert technologique;
    5. l’identification de modifications légales ou réglementaires qui permettraient de favoriser l’encadrement et l’accompagnement de ce secteur émergent.
  2. Alimenter la co-construction d’une fiche sur les enjeux prioritaires des éleveurs, transformateurs et distributeurs d’insectes comestibles par le biais de présentations et d’interventions des participants au webinaire.

Les producteurs d’insectes sont constamment en quête de moyens leur permettant d’optimiser leurs pratiques d’élevage afin de mieux répondre à la demande. À ce sujet, la valorisation de sous-produits agroalimentaires peut permettre de substituer les moulées céréalières couramment utilisées pour nourrir les insectes.

 

INVENTAIRE DES ÉLEVEURS ET TRANSFORMATEURS D’INSECTES DU QUÉBEC

Un premier inventaire des éleveurs et transformateurs d’insectes au Québec avait été dressé en 2016 [6] . Une liste mise à jour avait ensuite été publiée en 2017 [7] . On y comptabilisait 5 éleveurs (dont certains encore en phase de conceptualisation ou en démarrage) et 4 transformateurs. En 2019, l’Association des éleveurs et transformateurs d’insectes du Québec (AÉTIQ) mentionnait des chiffres beaucoup plus élevés, avec 39 acteurs du milieu [8] . Force est de constater que ce secteur semble actuellement en forte croissance, mais qu’il est aussi très changeant, avec un nombre élevé de jeunes entreprises émergentes qui ne restent en activité que pour un temps limité. Afin d’avoir un meilleur portrait des éleveurs et transformateurs de produits d’insectes destinés à l’alimentation humaine et animale en activité au Québec, un inventaire a été constitué en croisant des données recueillies par différents acteurs de la filière, soit la Vitrine Entotechnologique, l’AÉTIQ, la Société d’Entomologie du Québec, le MAPAQ et le laboratoire d’Agriculture Urbaine, ainsi qu’en faisant un appel dans différents réseaux, dont la page Facebook des Éleveurs d’insectes du Québec. La liste exhaustive des entreprises recensées par les différentes organisations était très variable, et des contre-vérifications ont été effectuées en visitant les pages web, les pages des réseaux sociaux, ou en contactant directement les entrepreneurs recensés si leurs contacts étaient disponibles. Sur un inventaire global de 38 entreprises recensées, 23 sont présentement susceptibles ou confirmés être toujours en activité en novembre 2020.

 

SONDAGE SUR LE SECTEUR DES ÉLEVEURS ET DES TRANSFORMATEURS D’INSECTES

En préparation à un atelier de la Vitrine Entotechnologique le 30 mars 2020, un questionnaire a été acheminé aux 62 participants inscrits. Il contenait 16 questions en lien avec les objectifs de l’atelier en plus de 3 questions pour fins de classification. Des 58 participants au webinaire, 37 ont complété le questionnaire. De ces répondants, 81% (30 répondants) se sont identifiés aux secteurs d’activité ciblés par l’atelier (éleveurs, transformateurs ou soutien à l’industrie). Parmi les autres répondants, il y avait deux distributeurs, deux projets d’entreprises en développement, un OBNL en soutien aux PME de différents secteurs d’activité économique, un producteur de moulée d’élevage conventionnelle et une personne non-affiliée au secteur des insectes. Les personnes présentes au webinaire mais n’ayant pas rempli le questionnaire étaient soit collègues d’un répondant ou des acteurs externes à la filière. Pour obtenir un portrait plus complet et représentatif du secteur, 5 éleveurs et un transformateur de produits à base d’insectes ont été contacté ultérieurement par téléphone pour compléter le formulaire.

Au total, 21 répondants étaient des éleveurs d’insectes. De ceux-ci, 12 ont identifié leur secteur primaire d’activité comme étant l’élevage et 6 ont identifié l’élevage comme représentant une activité secondaire. Parmi les 16 répondants dont l’activité primaire est l’élevage, 75% (12) visent en premier lieu l’alimentation humaine. De ces derniers, cinq s’intéressent aussi à l’alimentation animale. Parmi les cinq éleveurs visant d’abord le marché de l’alimentation animale, deux s’intéressent aussi à l’alimentation humaine.

Les transformateurs de produits d’insectes représentaient 43% des participants (13 répondants). Seuls trois répondants ont identifié les produits à base d’insectes comme étant leur premier créneau d’activité (deux visant l’alimentation humaine et un visant l’alimentation animale). Les, dix autres répondants ont identifié les produits d’insectes transformés comme faisant partie de leurs créneaux secondaires (deux visant l’alimentation animale et huit visant l’alimentation humaine).

Les acteurs en soutien à la filière étaient nombreux (16). Ils comprenaient 11 répondants impliqués dans la recherche et 5 oeuvrant dans des organisations non gouvernementales. Les acteurs des organisations gouvernementales n’ont identifié aucun secteur d’activité secondaire.

 

PROFIL DES ÉLEVEURS D’INSECTES

La section qui suit concentre son analyse sur les éleveurs d’insectes ayant répondu au questionnaire. L’échantillonnage des éleveurs est relativement exhaustif puisque 21 éleveurs ont répondu au questionnaire, et que notre inventaire suggère que 23 éleveurs serait présentement actifs au Québec. Le présent sondage serait donc le premier et le plus complet portrait de la filière québécoise. Les réponses devraient donc être informative et aider dans les démarches visant à structurer la filière entomophagique au Québec pour cette industrie en émergence.

Le profil des répondants sondés confirme que l’élevage d’insectes comestibles est une activité relativement récente au Québec, avec les plus vieux entrepreneurs en activité depuis à peine 2016, et près de la moitié (47%, n=8) d’entre eux ayant démarré leurs activités depuis 2019 (Figure 1). Les entreprises d’élevage sont aussi très petites, 50% d’entre elles ayant un ou deux employés seulement, et une seule possède plus de neuf employés (Figure 2).

Pour estimer la production totale d’insectes, tout en protégeant les données confidentielles précises des producteurs, le sondage offrait la possibilité de classifier la production mensuelle en base fraîche par catégories (1 à 249 kg, 250 à 499 kg, 500 à 999 kg, 1 à 5 tonnes et 5 tonnes et plus). La médiane de chaque classe, ainsi que le minimum et le maximum ont été utilisés pour estimer la production totale. Pour éviter un biais inhérent à appliquer des données médianes à l’ensemble des producteurs n’ayant pas été rejoints par le sondage, aucune donnée n’a été corrigée pour prendre en considération les éleveurs non rejoints. Les chiffres présentés représentent donc possiblement un sous-estimé de la production totale.

Le nombre d’éleveurs de différents insectes recensés dans notre inventaire ainsi que dans notre sondage concordent entre eux. Selon nos informations, seule une entreprise s’adonnerait commercialement à plus d’un type d’insectes, mais il est connu que certains éleveurs ont de petites productions secondaires ou marginales qui ne sont pas d’intérêt commercial. Selon notre sondage, ainsi que notre inventaire croisé des producteurs, les éleveurs de ténébrions sont majoritaires (11 éleveurs). Leur production totale en base fraîche (humide) oscille entre 21 et 102 tonnes par année (médiane de 61 tonnes). Parmi les 7 éleveurs de grillons répondu au sondage, on estime que leur production oscille entre 27 et 137 tonnes par année (médiane de 82 tonnes). Enfin, deux répondants ont affirmé élever des mouches soldat noires (environ 136 tonnes par année). Ainsi, un estimé très grossier de la production d’insectes du Québec, basé sur la majorité des producteurs québécois recensés, laisse entendre qu’entre 184 tonnes et 375 tonnes d’insectes (médiane de 279 tonnes) sont élevés par année sur notre territoire par la vingtaine d’éleveurs qui s’y trouvent.

La forte majorité (68%) des 28 personnes ou entreprises s’adonnant aux élevages d’insectes concentrent leurs activités à l’échelle provinciale (Figure 1). Plusieurs visent aussi une échelle plus locale ou régionale (25%), tandis que deux (7%) ont des activités commerciales à l’échelle nationale. Outre un répondant, aucun éleveur n’a totalement écarté l’économie circulaire comme principe d’approvisionnement pour ses intrants d’élevage (Figure 2). Cependant, pour 40% des éleveurs, l’économie circulaire demeure une aspiration (25%) ou une initiation (15%). 30% des éleveurs intègrent sécurisent 25% à 75% de leur intrant parmi les sous-produits d’autres entreprises agroalimentaires. 25% des éleveurs ont fait de l’économie circulaire leur mission première d’entreprise et affichent une performance supérieure à 75% d’inclusion de sous-produits agroalimentaires dans leurs élevages. Seule la moitié des éleveurs sondés ont rapporté être affilié à l’Association des éleveurs et transformateurs d’insectes du Québec. En outre, 35% des éleveurs sondés n’avaient à ce moment aucune affiliation. Quatre s’impliquaient directement dans la structure de la Table filière en production et transformation d’insectes comestibles pour faire reconnaître ce secteur auprès du MAPAQ. Parmi les autres organisations mentionnées figurent les Amis de l’Insectarium ainsi que le comité sur les protéines alternatives du Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ).

Figure 2: Âge des élevages d’insectes québécois (13 répondants)

Figure 3: Échelle d’activité des éleveurs d’insectes sondés.

Figure 4: Type d’insectes produits dans les fermes québécoises.

Figure 5: Production mensuelle des différents éleveurs québécois.

Figure 6: Adhésion aux principes d’économie circulaire chez les éleveurs d’insectes québécois.

Figure 7: Affiliation primaire des éleveurs d’insectes du Québec sondés.

 

 

IMPACT DE LA PANDÉMIE DE COVID-19

En raison de la crise de la Covid-19, des mesures de distanciation sociale au Québec ont été imposées le 13 mars 2020 et les commerces non-essentiels ont été fermés dix jours plus tard. Même si les secteurs de l’alimentation demeurent des services essentiels, des changements observés dans les habitudes de consommation influencent la chaîne de production agro-alimentaire. Les producteurs d’insectes n’y sont pas étrangers. 68% des éleveurs d’insectes du Québec ont affirmé que la crise avait un certain impact sur leurs activités. Parmi ceux-ci, 7 ont observé un impact marqué, 5 un impact drastique mettant potentiellement en péril leurs activités et un a réduit ses activités au strict minimum. Cinq entreprises n’ont observé aucun impact majeur. Une entreprise en démarrage a pu poursuivre ses activités de développement sans impact majeur.

Figure 8: Impact de la crise du Covid-19 sur les éleveurs d’insecte québécois.

Le principal impact de la pandémie déploré par les éleveurs d’insectes du Québec ayant répondu au sondage est la baisse des opportunités ou un frein dans le développement des affaires. Suivent une baisse de clientèle, un manque de liquidités, des difficultés d’approvisionnement, la mise à pied d’employés et l’incapacité de certains travailleurs à se déplacer pour des motifs de quarantaine (Figure 5). Il est à noter que certains de ces effets ont été observés après seulement deux semaines de mesures spéciales, mettant ainsi en lumière la fragilité du secteur qui est surtout composée de jeunes entreprises en démarrage ou en croissance. A contrario, pour les entreprises plus solidement établies, l’impact a été mineur puisque les élevages étaient considérés comme des services essentiels durant la période de confinement, et il y a eu pour certains des opportunités de croissance des ventes pour des créneaux particuliers (alimentation animale).

Pour faire face à la crise, plusieurs éleveurs ont dû ajuster leurs opérations (Figure 6). Sept éleveurs ont fourni un estimé de perte mensuelles liées à la covid se chiffrant entre 0 et 15 000$, avec une médiane de 2000$ et une moyenne de 4386$. Les autres répondants ont été dans l’impossibilité de chiffrer exactement la valeur de leurs pertes, ou estiment que celles-ci sont marginales.

Un plan de contingence aide à prévenir, prédire et réagir à des situations d’urgence et permet de minimiser les conséquences négatives liées à la réduction de performance ou au temps d’arrêt des opérations[1]. Ce plan comporte normalement des éléments liés à l’évaluation des risques, la planification des opérations, la preuve de viabilité du plan et de son exécution. Parmi les 18 éleveurs d’insectes ayant répondu à cette question, trois disposaient d’un plan de contingence avant le début de la crise, cinq ont rédigé leur plan de contingence dès le début de la crise, six étaient en cours de rédaction au moment de compléter le sondage, trois n’avaient pas encore amorcé cet exercice et un seul n’avait pas l’intention de rédiger un plan. Ce résultat dénote une grande variabilité dans le taux de préparation des éleveurs face à des imprévus, comme la crise de la COVID-19, certains étant proactifs ou rapidement réactifs et d’autres n’étant pas prêts à affronter cet événement inattendu.

Parmi les aspects couverts dans les plans de contingence, la majorité des répondants ont affirmé avoir renforcé leurs protocoles de salubrité et de biosécurité (15 répondants), adopté des mesures de gestion de risque liées à leurs approvisionnement (10 répondants) et/ou réduit le personnel présent afin de respecter les mesures de distanciation sociale (9 répondants) (Figure 8). Parmi une liste de six aspects ayant pu être couverts dans les plans de contingence (ou équivalents opérationnels), les producteurs en ont adopté entre un et cinq (moyenne de 2,5; écart-type de 1,3) (Figure 8). Environ la moitié des répondants ont sécurisé du financement propre à la pandémie et modifié leurs protocoles opérationnels ainsi que leurs paramètres environnementaux. Notamment, un éleveur de grillons a affirmé avoir réfrigéré ses œufs d’insectes dans le but de conserver ses ressources financières en attendant la relance. Enfin, les plans de gestion de risques liés à l’écoulement des stocks semblent être moins fréquents, adoptés par seulement quatre répondants.

Figure 9: Impacts de la pandémie sur les éleveurs d’insectes du Québec.

Enfin, lorsque sondés sur ce que le gouvernement pourrait faire pour venir en aide aux producteurs d’insectes dont la filière est en émergence en temps de crise :

  • Fournir une aide financière incluant:

    • davantage de subventions, moins de prêts;
    • des subventions à hauteur équivalente à d’autres endroits dans le monde pour éviter que des entreprises fortement subventionnées de l’extérieure viennent prendre les parts de marché des producteurs locaux;
    • rendre plus flexibles les conditions d’admissibilité pour différents programmes, notamment, qui prônent l’innovation mais qui ne savent pas comment catégoriser les projets qui débordent des activités sectorielles traditionnelles;
    • des subventions au chômage;
    • l’accès facilité aux prêts pour favoriser l’obtention de liquidités;
    • permettre le soutien aux entrepreneurs en démarrage qui ne se versent pas encore de salaires;
    • la disponibilité d’un financement accru pour soutenir la recherche en période de relance;

  • Éclaircir la communication, notamment :

     

    • Uniformiser l’information dispensée aux éleveurs selon leur région d’appartenance pour minimiser les zones grises dans les pratiques acceptables;
    • Statuer que l’acceptabilité des matières entrantes dans les élevages, à l’effet qu’elles ne constituent pas un mode de gestion des matières résiduelles si elles sont utilisées dans les élevages d’insectes;
    • Augmenter la sensibilisation gouvernementale à propos des protéines et des choix alimentaires écoresponsables, comme l’ont fait d’autres régions dans le monde;

  • Maximiser l’adoption de bonnes pratiques, notamment :

    • Établir des normes pour la production et le contrôle des élevages d’insectes, notamment en économie circulaire, qui répond aux pratiques et au besoin de l’industrie, dans un souci de bien protéger le public;
    • Faire preuve de souplesse dans l’application de la réglementation, notamment avec des assouplissements temporaires des règles de transformation;

  • Encourager l’achat local.


Lorsque sondés sur les actions que devraient entreprendre les éleveurs d’insectes face à la crise, les répondants ont mentionné :

  • Améliorer les communications entre éleveurs;

  • Favoriser la solidarité entre éleveurs, incluant:

    • Une collaboration accrue;
    • Se regrouper ou s’associer à d’autres fédérations comme la Société d’Entomologie du Québec;
    • Créer un réseau pour combler plus aisément les besoins des clients;

  • Limiter les dégâts d’opération en:

    • Réduisant les postes de dépenses pour compenser les pertes de revenus ou l’insécurité;
    • Assurant la préservation de souches d’insectes pour combler les besoins de ceux qui auraient réduit ou interrompu leurs activités en période de crise;

  • Mieux définir les besoins et objectifs des producteurs et des transformateurs :

    • Chaque membre de la filière est unique;
    • Certains producteurs visent une production artisanale et un marché hyper local tandis que d’autres veulent croître et exporter;
    • Contribuer à l’alignement des bonnes pratiques pour que les éventuelles règlementations soient alignées avec les besoins de l’industrie;

  • Reconnaître la filière et tous les acteurs qui en font partie, en étant ouvert à la diversité des modèles d’affaire.


Parmi les réponses aux deux questions précédentes, on peut constater que certains éléments pourraient notamment s’appliquer à une consolidation du secteur, même en dehors du cas particulier de la pandémie. L’élément concernant l’assouplissement temporaire des règles de transformation montre que le confinement heurte durement le fonctionnement régulier des entreprises, mais il faut prendre garde à des assouplissements qui pourraient avoir des répercussions au niveau du contrôle nécessaire pour maintenir des standards élevés dans l’hygiène et la salubrité des aliments. Nonobstant ceci, une réglementation trop sévère risquerait de freiner l’émergence de cette filière sans réellement réduire le risque pour les consommateurs.

Figure 10: Ajustement des opérations d’élevage d’insectes en raison de la crise de la Covid-19.

Figure 11: Plan de contingence chez les éleveurs d’insectes québécois.

Figure 12: Aspects couverts dans les plans de contingence ou autres protocoles des éleveurs d’insectes pour faire face à la crise.

Sources

[1]
Dunkel, F. V., and C. Payne. « Introduction to edible insects. » Insects as sustainable food ingredients. Academic Press, 2016. 1-27.

[2] Dussault, Médhavi. 2017. https://savoirs.usherbrooke.ca/bitstream/handle/11143/10287/Dussault_Medhavi_MEnv_2017.pdf

[3] Dussault, Médhavi. 2017. https://savoirs.usherbrooke.ca/bitstream/handle/11143/10287/Dussault_Medhavi_MEnv_2017.pdf

[4] Lähteenmäki-Uutela, Anu, et al. « Insects as food and feed: laws of the European Union, United States, Canada, Mexico, Australia, and China. » European Food and Feed Law Review (2017): 22-36.

[5] La Fédération des Producteurs d’insectes du Québec parlait de 39 producteurs en mars 2019. https://www.journaldequebec.com/2019/03/11/la-production-dinsectes-comestibles-en-pleine-explosion-au-quebec

[6] Dussault, Médhavi. 2017. https://savoirs.usherbrooke.ca/bitstream/handle/11143/10287/Dussault_Medhavi_MEnv_2017.pdf

[7] Hénault-Ethier, L., et al. (2017). « Les insectes au service de l’humain pour la gestion des résidus organiques. » Vecteur Environnement 50(2): 46-53.

[8] https://aetiq.com/lindustrie

[9]  www.lesdefinitions.fr/plan-de-contingence

Remerciements

L’équipe de la Vitrine Entotechnologique remercie les conférenciers ayant participé à l’atelier et les intervenants ayant contribué à la révision de la présente fiche : Édith Côté, Conseillère en transformation alimentaire, MAPAQ; Véronique Bouchard, AÉTIQ; Marie-Hélène Deschamps et Grant Vandenberg, Université Laval; Éric Duchemin, AU-LAB et Université Laval. Ce projet est financé par l’entremise du Programme de développement sectoriel, en vertu du Partenariat canadien pour l’agriculture, entente conclue entre les gouvernements du Canada et du Québec.

Citation suggérée

Hénaut-Ethier, L., Fortin, A., Normandin, É., D. Renaud, G., Hotte, N. (2022). État de l’industrie des éleveurs et transformateurs d’insectes comestibles au Québec – regard sur les répercussions de la pandémie de COVID-19.TriCycle Inc. 16 p.

Partager cette publication